Profession solennelle de sœur Clotilde de la Miséricorde

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Contributeur : Communautes | Carmel

La cérémonie de profession solennelle de sr Clotilde de la Miséricorde aura lieu le 1er mai à 10h, au carmel d’Uzès, au cours de l’Eucharistie présidée par Mgr Robert Wattebled, évêque de Nîmes. Nous sommes invités à nous unir par la prière à cette célébration qui sera retransmise quelques jours après la profession sur le site internet www.carmel-uzes.fr. Mais d’abord : Témoignage.

Issue d’une famille catholique pratiquante, seconde d’une fratrie de cinq enfants, j’ai eu la grâce de grandir dans un milieu porteur. Mon environnement social était au diapason avec l’éducation et la foi que je recevais de mes parents. Catéchisée par une communauté religieuse apostolique, j’ai été, dès mon plus jeune âge, en contact avec la réalité de la vie consacrée, comprenant qu’elle était une possibilité de chemin de vie, au même titre que le mariage. Je n’y ai jamais été fermée, sans pour autant désirer devenir religieuse.

Après cette enfance protégée, heureuse et innocente, mon adolescence fût plus âpre. Un déménagement engendrant la perte de beaucoup de repères et de sécurités m’a fait découvrir un monde où croire en Dieu faisait de moi un extraterrestre. Du jour au lendemain, ce que j’avais reçu dans mon enfance se révélait être à contre courant de ce que proposait la société. Expérimentant l’hostilité que pouvait susciter ma foi à l’école, je l’ai mise sous le boisseau, espérant ainsi moins souffrir. Je continuais, malgré tout, à suivre mes parents à la messe le dimanche pour ne pas être en porte-à-faux avec eux. J’ai alors été tiraillée plusieurs années durant par un véritable manque de cohérence dans ma vie, ce qui m’a conduite au fond du gouffre. Pourquoi et comment vivre si je ne pouvais être moi-même sans être rejetée ?

A ce moment, une amie de ma famille m’a proposé de participer à un rassemblement de jeunes à Paray-le-Monial. N’ayant pas le courage de me battre pour refuser, je me suis retrouvée, contre mon gré si je puis dire, au milieu de milliers de jeunes, heureux et fiers de leur foi. Si je ne savais pas ce que je faisais là, Dieu, Lui, le savait : Il m’attendait.
Il m’attendait pour se révéler à moi, pour me relever et me redonner le goût de vivre. Lors d’une veillée d’adoration, j’ai été saisie par le regard qu’Il posait sur moi. Un regard d’un amour inconditionnel et qui ne me jugeait pas.
« Dans son regard, j’ai tout compris » (Saint Augustin)
Je suis alors allée me confesser, j’ai déposé mon fardeau et fait l’expérience de l’infinie Miséricorde de Dieu.
J’avais rencontré Jésus, Il était réellement devenu quelqu’un pour moi et désormais, du plus profond de mon être, je pouvais, sans vaciller, affirmer avec conviction « Je crois en Dieu ! »

Cette rencontre foudroyante avait transformé ma vie. Jésus était devenu ma seule boussole. J’étais brûlée du désir de Le donner au monde entier. Étant femme, je ne pouvais devenir prêtre, ce qui me semblait être la meilleure façon de répondre à ce désir. C’est alors que, sur les conseils d’un prêtre à qui je m’étais ouverte, je commençais à découvrir et à prier Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, lui demandant d’éclairer mon chemin. Grand fut mon étonnement de découvrir qu’elle avait eu le désir d’embrasser toutes les vocations et que, malgré cela, au lieu de sillonner le monde pour annoncer le Christ, elle rentra au Carmel, un Ordre cloîtré. J’étais très marquée par son chemin et sa vocation sans réaliser une seconde que la soif de Dieu qu’elle exprimait dans son autobiographie ressemblait fortement à celle qui habitait mon cœur.
Je poursuivais donc mes études supérieures en vue de devenir psychologue en soins palliatifs.

Au cours d’une retraite dans un foyer de charité, le climat de silence et de prière m’a obligée à regarder en face des questions qui me travaillaient et que j’écoutais,, les remettant toujours à plus tard : « Est-ce normal que Dieu prenne autant de place dans mon cœur ? Attend-Il quelque chose de moi ? »
Jusque là, j’avais mis ces questions de côté, n’étant attirée par aucune des communautés religieuses que je pouvais connaître. De nouveau, je me suis tournée vers Petite Thérèse. C’est alors qu’est montée en moi cette question : « Pourquoi pas le Carmel ? » ; question qu’inconsciemment je refusais de me poser tant l’image que je pouvais avoir de cet Ordre me faisait peur. A l’instant même tout s’est éclairé. J’ai compris que Dieu m’y attendait. Libérée autant que bouleversée, je suis allée m’en ouvrir au prêtre qui prêchait la retraite. Quel ne fut pas mon soulagement devant son accueil bienveillant et profondément respectueux de ma liberté. Ne connaissant le Carmel que par idées reçues, ce prêtre m’aida à prendre contact avec un Carmel qu’il connaissait bien. C’est ainsi que j’ai découvert celui d’Uzès.

Dès mon premier séjour à l’accueil du monastère j’ai compris intérieurement que que le Seigneur m’appelait là et que je désirais Lui répondre. Dans mes contacts avec les sœurs, j’ai été rassurée, ici aussi, par leur respect de ma liberté.

Ma certitude intérieure prise en considération, les sœurs n’ont pas pour autant fait l’impasse d’un vrai temps de discernement dont une étape importante et décisive fut le stage d’un mois que j’ai passé à l’intérieur de la clôture, partageant la vie de la communauté.
Je compris, à la suite de Petite Thérèse, que la vocation du Carmel était la meilleure façon pour moi de donner Dieu au monde entier sans limite de temps ou d’espace. Les carmélites, sont comme une armée qui se bat par la prière pour accompagner les âmes vers le Père. (cf Thérèse de Jésus, Chemin de perfection, chapitre 18). Nous avons un rôle de maternité spirituelle, on enfante les âmes par notre vie de prière et notre humble quotidien vécu dans l’amour et l’oblation.

L’expérience positive de ce stage confirma mon désir d’entrer dans cette communauté, ce que je fis quelques mois plus tard, accompagnée et soutenue dans mon choix par ma famille.

Commença alors le temps de formation marqué par différentes étapes. Le temps du postulat fut surtout un temps de découverte et d’adaptation. Au terme de cette période, j’ai reçu l’habit du Carmel, ce qui marqua le début du temps du noviciat où l’accent est mis plus particulièrement sur la formation (humaine, spirituelle…) et sur l’intégration à la vie communautaire. Est venue ensuite l’étape de la première profession (profession temporaire) où j’ai fait vœu de pauvreté, de chasteté et d’obéissance pour 3 ans, renouvelée les années suivantes jusqu’à être « prête » à m’engager définitivement par la profession solennelle. Ces vœux sont le chemin qui nous est offert pour vivre notre vie de disciples et être au Christ partager avec Lui son œuvre de Rédemption et sauver les âmes, en acceptant soi-même de se laisser rejoindre dans sa pauvreté pour être sauvée – Il s’agit d’une consécration « plus intime », qui s’enracine dans le Baptême et dédie totalement à Dieu. (CEC 916)

Tout cela se vit à travers l’oraison (prière silencieuse où l’on développe une amitié vivante avec le Christ) et une vie fraternelle (école de charité et de connaissance de soi) : nous puisons au Cœur de Dieu, dans l’oraison, l’eau vive de la charité fraternelle. En réformant le carmel, notre Mère, Sainte Thérèse de Jésus (d’Avila) a donné une place centrale à l’oraison – 2h y sont spécifiquement consacrées chaque jour. Pour vivre une authentique vie d’oraison, le silence et la solitude sont nécessaires au cours de la journée. La contemplative recherche la Face de Dieu. Cela passe par la Parole goutée, méditée et intériorisée qui nous conduit à une meilleure connaissance de nous-mêmes pour être libres et vraies devant Dieu et devant les autres (la clôture ne nous empêche pas de faire bon nombre de kilomètres intérieurs) Mais si la vie de la carmélite est pétrie de silence et de solitude, nous ne sommes pas pour autant que des ermites et avons aussi une vraie vie communautaire. De même que nous sommes rassemblées pour vivre l’Eucharistie, source et sommet de chacune de nos journées, de même, le repas partagé ensemble au réfectoire approfondit notre communion. Ce parallèle est aussi vrai entre nos 2h quotidiennes d’oraison et nos deux temps de récréation. Sainte Thérèse d’Avila nous l’affirme « Autant vous aurez fait de progrès dans l’amour du prochain, autant vous en aurez fait dans l’amour de Dieu » (5D3,8). Un autre temps fort est celui de nos journées mensuelles de chapitre communautaire où, le matin, nous travaillons ensemble un thème choisi et l’après-midi, au cours d’une célébration nous nous demandons pardon pour ce qui, au quotidien, aurait pu blesser la communion fraternelle.

Alors que je me prépare à m’engager définitivement dans cet ordre par la profession solennelle, je suis parfois saisie d’une sorte de vertige face à la grandeur de cet engagement. Mais ma paix et ma joie sont profondes. C’est avant tout Jésus Lui-même qui me conduit , et me donne sa grâce pour réaliser pas après pas la volonté du Père. Je marche avec Jésus, au cœur d’une belle communauté, dans l’Église et pour l’Église.
« Ma force et mon chant c’est le Seigneur » (ps 117) aussi « je compte sur la fidélité de mon Dieu » (ps 51), sûre qu’ « Il me conduit par le juste chemin » (ps 22)